Temps mort – Le TEN-Test

En 2000, B.C.J. Moore présentait un nouveau test audiométrique tonal, le TEN-Test, censé être aussi efficace  que l’utilisation des courbes psycho-acoustiques d’accord (85% environ aussi précis, selon ses travaux) dans la détection de « Zones Mortes cochléaires ». Une « Zone Morte » étant définie par l’absence ou une importante raréfaction des cellules cilliées internes (CCI) dans la cochlée, rendant toute amplification prothétique inutile, voire nuisible à l’intelligibilité selon certains auteurs à l’époque.
Ce test est un test d’audiométrie tonale, d’abord effectuée dans le silence (classique…), puis ré-effectuée dans un bruit envoyé de manière ipsilatérale. On demande alors au sujet testé de déterminer son seuil de perception au milieu de ce bruit, appelé « TEN ». TEN= « Threshold-Equalising Noise », ou « Bruit Egalisateur de Seuil ».

En 2000, B.C.J. Moore présentait un nouveau test audiométrique tonal, le TEN-Test, censé être aussi efficace  que l’utilisation des courbes psycho-acoustiques d’accord (85% environ aussi précis, selon ses travaux) dans la détection de « Zones Mortes cochléaires ». Une « Zone Morte » étant définie par l’absence ou une importante raréfaction des cellules cilliées internes (CCI) dans la cochlée, rendant toute amplification prothétique inutile, voire nuisible à l’intelligibilité selon certains auteurs à l’époque.

Ce test est un test d’audiométrie tonale, d’abord effectuée dans le silence (classique…), puis ré-effectuée dans un bruit envoyé de manière ipsilatérale. On demande alors au sujet testé de déterminer son seuil de perception au milieu de ce bruit, appelé « TEN ». TEN= « Threshold-Equalising Noise », ou « Bruit Egalisateur de Seuil ».

C’est justement dans ce « bruit » que réside tout  le test. Son élaboration repose sur des fondements psycho-acoustiques relativement récents. Son but est donc « d’égaliser/équaliser » le seuil à son niveau. Par exemple pour une surdité en pente régulière:

L’audiométrie a d’abord été réalisée au casque (ronds rouges) sans le bruit, par pas de 2dB. Elle est ensuite refaite avec présente du TEN, ici envoyé à 70dB/ERB. Les seuils « tombent » alors à l’intensité d’émission du TEN, et devraient s’aligner aux environs de 70dB HL pour chaque fréquence testée. Aucun autre signal masquant ne permet cela, ni le bruit blanc, ni le bruit rose. Le TEN est en effet élaboré de telle sorte qu’il a un pouvoir masquant égal dans chaque ERB, son intensité n’est pas donnée strictement en dB HL, mais en dB/ERB.

ERB ?

Si vous vous faites le test et que vous utilisez un TEN à 70dB/ERB, vous vous apercevrez que c’est fort et à 80dB/ERB vraiment très fort. ERB signifie « Equivalent Rectangular Bandwidth » ou en gros, « Bande de largeur rectangulaire équivalente ». Sous-entendu: « équivalente à un filtre auditif ».

Ces « filtres auditifs » sont en fait les « Bandes critiques » (mais pas exactement pour Moore), décrites par Fletcher dans les années 1940, au nombre de 24 (échelle des Barks). Elles correspondent à des « filtres cochléaires » présentant de nombreuses particularités. Par exemple, pour un son pur à 1000Hz dans la bande critique 1000Hz (qui fait 160Hz de large); l’ajout d’un second son pur de même intensité à une fréquence proche du premier (ex: 1010Hz) mais dans la même bande critique (compris dans cette bande de 160Hz) ne provoquera pas d’augmentation de sonie. Si le second son pur « sort » de la bande critique 1000Hz, il provoquera un changement de sonie. Ces propriétés (et d’autres encore) ont été étudiées et affinées depuis Fletcher et Zwicker, et il est apparu plus simple de modéliser ces « filtres auditifs » qui ont une forme de cloche (sommet en pointe et extrêmes aplatis), par leur « équivalent rectangulaire » (équivalent rectangulaire de la surface ou aire du filtre auditif):

Filtre auditif et ERB. C. Jurado, D. Robledano - 2007
Filtre auditif et ERB. C. Jurado, D. Robledano - 2007

Mais B.C.J. Moore dans les années 80 a entrepris (avec d’autres) de re-mesurer la largeur des filtres cochléaires en utilisant une technique dite du « bruit à encoche », donnant une meilleure précision dans la détermination de leur largeur en fonction des fréquences. Je précise qu’il n’y a bien entendu ni « 24 bandes critiques », ni « emplacements ERB » fixes et bien délimités dans la cochlée, mais un continuum chevauchant de filtres cochléaires. Si l’on prend une fréquence quelconque, par exemple toujours 1000Hz, on s’aperçoit que la bande critique suivante (voir propriétés plus haut) est à 1770Hz, le filtre précédent à 840Hz, etc. Ceci est valable pour les bandes critiques et les ERB (fréq. centrales différentes pour ces dernières).

Les ERB (échelle en « Cams », par opposition aux « Barks ») sont un peu plus étroites que les bandes critiques, notamment dans les aigus:

BC, ERB et 1/3 d'octave. XD 2012.

Pour une revue détaillée du concept de « filtres cochléaires » et de leurs propriétés (la machine humaine et son oreille en particulier sont incroyables…), la dernière édition de Psychology of Hearing de BCJ Moore est extrêmement détaillée, très didactique et progressive dans l’approche de concepts psycho-acoustiques pas toujours évidents (il appelle ça « Introduction » mais ça fait plus de 400 pages…). Vous trouverez également dans ce document libre (p. 421 à 427) divers développements sur les BC et ERB.

Donc lorsque l’on utilise le TEN à 70dB, il s’agit donc de 70dB dans chaque ERB, d’où le niveau ressenti: fort !

Le but décrit par Moore avec l’utilisation du TEN est d’éviter « l’écoute hors fréquence » (« Off Frequency Listening »). En présumant qu’une zone cochléaire est « morte » selon les critères décrits plus haut, l’augmentation du niveau du son pur de test entraîne un « pattern d’excitation » qui s’élargit sur la membrane basilaire, permettant au final à des cellules cilliées situées plus loin de la zone testée, de « répondre » à la place de la fréquence testée. On obtient alors un « faux-positif » audiométrique faisant penser à une perception réelle dans la zone. En réalité, le patient aura perçu un stimulus plus large bande (type bruit filtré), mais pas le son pur envoyé.

Le but du TEN-Test est donc d’utiliser un bruit masquant (le TEN), étudié spécifiquement pour donner la même intensité de masque dans chaque ERB. En présence du bruit masquant, les seuils doivent donc « tomber » au niveau du bruit puisqu’en saturant chaque ERB, il empêche « l’écoute hors fréquence ». Et ça fonctionne (l’égalisation du seuil au niveau du TEN), validant au passage de manière indirecte le concept d’ERB face au concept de bandes critiques.

Imaginons maintenant qu’une zone cochléaire ne possède plus de CCI. Nous testons (sans bruit masquant) en augmentant le signal de test, le pattern d’excitation augmente et les régions « saines » les plus proches finissent par répondre. Faux-positif. Le re-test en présence du TEN empêche la détection hors fréquence: le seuil masqué « tombe ». Exemple (réel, on en reparle plus bas):

 

TEN-Test
TEN-Test 70dB/ERB

 

Sans masque, le seuil de ce patient est représenté par les croix. Le TEN est ensuite appliqué à 70dB/ERB. Les fréquences 500 à 1000Hz tombent à 76 et 74dB HL, la fréquence 1500Hz tombe à 80dB HL (TEN + 10dB). La fréquence 2000Hz tombe à 86dB HL (TEN + 16dB). Les fréquences 3 et 4KHz ne « bougent » pas (mais elles auraient pu…).

B.C.J. Moore défini le critère de zone morte ainsi:

  • Pour les seuils dans le calme (sans TEN) inférieurs au TEN (ici, inférieurs=meilleurs que 70dB, donc de 500 à 2000Hz compris): Zone Morte Cocléaire (ZMC) si le « seuil masqué » est au moins 10dB au dessus du seuil « non-masqué » et 10dB au-dessus du bruit. Ici, le 1500Hz est « limite » et le 2000Hz est « positif » (ZMC @ 2KHz).
  • Pour les seuils dans le calme (sans TEN) supérieurs au TEN (ici le 3 et 4KHz): ZMC si le « seuil masqué » est juste supérieur au « seuil non-masqué » (ici si le 3KHz était passé de 86dB à 88dB HL et le 4K de 98 à 100dB HL). En réalité, il est conseillé dans ce cas d’utiliser pour ces deux fréquence un TEN plus élevé (80dB/ERB) pour voir si l’on obtient un décalage plus important des seuils masqués…
Et donc dans ce cas, on utiliserait uniquement la bande jusqu’à 1500Hz pour corriger, toute information apportée à partir de 2000Hz étant jugée inutile, voire nuisible à l’intelligibilité.
Voir pour plus de détails le PHONAK Focus 38 (PHONAK fait des trucs très bien 😉 )sur le sujet.

« Mais ça, c’était avant… » (Nous interrompons notre programme par une page de pub !).

Le TEN-Test est facile et rapide à administrer. Ses conclusions, binaires (Mort/Pas mort). Une littérature surabondante sur le sujet a été produite ces dix dernières années. Passé la première période de doute sur les résultats du test, de nombreux audiologistes ont tenté de dégager une règle d’amplification pour les sujets présentant une ZMC ou un TEN-Test positif. La » règle du 1.7Fe » a semblé s’imposer: si une zone morte est dépistée à xHz (appelé Fe), la bande passante de l’amplification ne devra pas dépasser 1.7*Fe.

Cette règle (les anglo-saxons aiment bien ce genre de trucs…) se basait aussi sur des travaux ayant mis en évidence une dégradation de l’intelligibilité chez des patients présentant des ZMC et chez qui la bande passante d’amplification n’avait pas été réduite (Vickers, Moore, Baer, 2001).
Des études plus récentes, et notamment l’article de Cox et al. en 2011, tendent cependant à minimiser l’impact négatif de l’amplification HF chez des sujets présentant des TEN-Tests positifs dans ces régions cochléaires. Une amplification HF maintenue resterait bénéfique dans ces cas. Ces auteurs réitèrent d’ailleurs dans un article à paraître bientôt: il n’est pas si évident que la réduction de bande passante d’amplification soit une bonne solution lors de TEN-Tests positifs.
Un résumé de leurs articles est disponible sur le blog Starkey.

Alors quoi ?

On fait un TEN-Test, il est positif. Certains auteurs disent « Pas d’amplification sur une supposée ZMC ! » et d’autres « Allez-y. Au pire ça ne fera que légèrement baisser le confort, au mieux, améliorer l’intelligibilité ! ».

Faire ou ne pas faire de TEN-Test ? That is the question !

J’enfonce le clou: certaines équipes de neuro-physiologie françaises sont très dubitatives sur le résultat immédiat du TEN-Test et son interprétation très « on/off » si je puis dire.

Je m’explique. En reprenant le patient précédent (oreille gauche). Ce monsieur a été testé lors du premier RDV de bilan pré-prothétique. Donc TEN-Test douteux à 1.5K et positif à 2K. Puis ce patient a été re-testé après deux mois d’appareillage (et donc de stimulation):

Là, on ne joue plus: les carrés gris = premier test, carrés bleus = second test (post-app. 2 mois). Le 1.5K est passé « négatif », le 2K est passé « limite ». TEN-Test en gros « négatif », amplification jusqu’à 2.5/3K environ supportée sans aucun problème.

Certes, le premier TEN-Test aura permis de démarrer une correction réduite en bande passante et s’élargissant ensuite. Le second TEN-Test n’aura fait que confirmer une sensation d’utilité d’une zone qui n’avait plus été stimulée depuis bien longtemps, mais qui était dans une moindre mesure certes, fonctionnelle. Je ne suis pas neuro-biologiste, mais sans trop m’avancer, le premier TEN-Test aura certainement mis en évidence une désafférentation de cette zone cochléaire, et le second, l’effet de la simulation sur la même zone et au-delà. J’attends avec impatience l’audiologiste qui pourra mener un test/re-test en pré/post-appareillage sur un échantillon conséquent et significatif…

Le TEN-Test est aujourd’hui disponible en routine sur le Nouvel Aurical, Affinity, et c’est tant mieux. Il est un outil de diagnostique irremplaçable pour l’audioprothésiste, permettant un accompagnement progressif dans la correction. L’adaptation prothétique reprend tout son sens: un acte professionnel sur le long terme. Pas un « objet ». Mais il doit être interprété avec prudence, notamment sur des résultats peu marqués.

XD.

PS: @ Maëlgad: j’y aurais mis le temps, mais je n’avais pas oublié que je devais t’envoyer ces infos 😉

And the winner is…

La revue Ear and Hearing vient de décerner son prix annuel du meilleur article scientifique. Pour l’année 2011, il s’agit d’un article pouvant nous intéresser en pratique quotidienne (c’est loin d’être toujours le cas pour les articles de cette revue…):
Cochlear Dead Regions in Typical Hearing Aid Candidates: Prevalence and Implications for Use of High-Frequency Speech Cues

La revue Ear and Hearing vient de décerner son prix annuel du meilleur article scientifique. Pour l’année 2011, il s’agit d’un article pouvant nous intéresser en pratique quotidienne (c’est loin d’être toujours le cas pour les articles de cette revue…):

Cochlear Dead Regions in Typical Hearing Aid Candidates: Prevalence and Implications for Use of High-Frequency Speech Cues

Cox, Robyn M.1; Alexander, Genevieve C.1,2; Johnson, Jani1; Rivera, Izel3

Vous pouvez le télécharger directement .

Le panel testé est large (170 personnes), ce qui en fait, quand on connait la difficulté à recruter des sujets potentiels, une étude solide sur ce plan là.

Le mode d’administration du test est différent de celui accessible par les audios, car il a été réalisé aux inserts, ce qui a ainsi évité les transferts transcrâniens lors de l’utilisation de fortes intensités. Et d’ailleurs, Moore a récemment développé une version du TEN-Test pour inserts.

Autre chose, le critère de « positivité » retenu pour le TEN-Test est très strict: TEN systématiquement supérieur aux seuils non-masqués et décalage masqué/non-masqué strictement supérieur à 10dB pour déclarer le TEN-Test positif.

Avec ces critères, la prévalence de ZMC était de 31% des sujets testés, pour des pertes mesurées de 60 à 90dB HL.

Les chercheurs ont ensuite posé une question: « Faut-il maintenir une amplification dans la (supposée) zone morte ? »

En clair, les individus présentant un TEN-Test positif peuvent-ils utiliser des indices « hautes fréquences » alors que la cochlée n’est pas capable de les analyser ? Faut-il arrêter l’amplification au début le la zone morte ? Qu’y a t-il à perdre en faisant une restriction de bande passante ou en démarrant un décalage fréquentiel (trop) tôt ?

Et bien contre toute attente, les individus présentant un TEN-Test positif ont mieux répondu aux tests d’intelligibilité dans le bruit AVEC une amplification des HF que sans amplification des HF.

Les auteurs conseillent donc une certaine prudence dans la restriction stricte de bande passante, même en cas de ZMC présumée. Une information délivrée dans les aigus, si elle n’altère pas le confort, apporte des informations analysées probablement dans d’autres zones cochléaires que celles altérés, avec amélioration potentielle des scores de reconnaissance verbale. Et même en cas de suspicion forte de ZMC, il n’est pas inutile de poursuivre une amplification jusqu’à 1.7 fois plus loin que la fréquence de départ de la supposée ZMC.

Je vous l’ai faite courte, mais c’est effectivement une très (longue et) belle étude. Avec implications dans notre quotidien…

 

Une vocale comme on ne les aime pas (part 2)

Juste pour info, patient du début de semaine.

Juste pour info, patient du début de semaine.

Voici la tonale:

Voici la vocale (cochléaires LAFON):

Là, ça ressemble à ce que tu as eu, Sébastien…

En « grattant » un peu, c’est à dire avec un TEN-Test:

L’OD n’est même pas montrée (tout est positif après 1K). L’OG, après utilisation du TEN à 80dB HL (barre noire rajoutée), fait plonger le 1.5K, puis le 3K. La cochlée est « trouée » ou en tout cas bien désafférentée (flèches).

Que faire ? Pas grand chose, sinon au moins pouvoir expliquer le problème, sans solutions (évidentes)…

Le TEN-Test: 5 min. de passation, des heures de galère évitées !

 

Intégration du TEN-Test sur Affinity 2.04

Le TEN (Threshold Equivalent Noise = bruit égalisateur de seuil) est le signal utilisé  pour effectuer un TEN-Test, ou test de zones mortes cochléaires.

Le TEN (Threshold Equivalent Noise = bruit égalisateur de seuil) est le signal utilisé  pour effectuer un TEN-Test, ou test de zones mortes cochléaires.

Mis au point par B.C.J. Moore en 2000, ses caractéristiques spectrales (spectre et densité) permettent de pratiquer un masquage ipsilatéral qui va faire « tomber » le seuil à la valeur d’émission du TEN (voire plus bas si une zone morte est présente): c’est à dire que si vous avez un seuil à 10dB HL sur toutes les fréquences (on présume que vous n’avez pas de ZMC !) et que vous envoyez le TEN à 70dB HL par exemple, votre seuil en présence de ce bruit va tomber à 70dB HL sur toutes les fréquences (500 à 4000Hz).

Ce type de masquage n’est ABSOLUMENT pas possible avec un bruit blanc ou même un Speech Noise (de spectre pourtant proche).

Spectre du TEN(HL)
Spectre du TEN(HL)

Le TEN-Test était jusque là disponible en CD de test, l’un en HL, l’autre en SPL.

Pour la première fois (à ma connaissance), le TEN est disponible sur une chaîne de mesure (Affinity, à partir de la version 2.04) au même titre q’un WN ou SN !

Il faut faire activer cette fonction (payant, environ 200€ en MAJ) et surtout calibrer ce signal (donc retour à la case étalonnage) pour pouvoir l’utiliser.

Il va donc pouvoir être possible de faire « en routine » des tests de zones mortes (ou « inertes », « désafférentées »… avant d’être déclarées définitivement perdues, après période de stimulation par appareillage !).

L’intégration du TEN(HL) Test sur Affinity 2.0.4 (par B.C.J. Moore).

Pour en savoir un peu plus sur la procédure, vous trouverez des détails sur le résumé des conférences et ateliers du Congrès 2004: pages 20 et suivantes, la conférence de Moore, et pages 51 et suivantes, l’atelier.

Pente de ski, zones cochléaires mortes, âge du capitaine…

Nous parlons souvent dans ce blog de formules de calcul de gains, de mesures in-vivo, de fonctions extraordinaires d’appareils sophistiqués, etc… et je crois qu’il le faut, car nous avons tous une forte demande de savoir ; il suffit de voir le monde présent aux EPU…
Mais pour une fois, je vais vous parler de « pifomètre », d’ à-peu-près et d’expérience de l’audioprothésiste (les uns n’entraînant pas l’autre !).

Nous parlons souvent dans ce blog de formules de calcul de gains, de mesures in-vivo, de fonctions extraordinaires d’appareils sophistiqués, etc… et je crois qu’il le faut, car nous avons tous une forte demande de savoir ; il suffit de voir le monde présent aux EPU…

Mais pour une fois, je vais vous parler de « pifomètre », d’ à-peu-près et d’expérience de l’audioprothésiste (les uns n’entraînant pas l’autre !).

Lors de recherches en 2004 sur les Zones Mortes Cochléaires (ZMC), j’étais tombé sur un article d’un audiologiste Nord-américain connu, Van Summers, posant la question de l’utilité du test de ZMC (mais ne contestant pas l’existence de ces dernières).

Il faut se souvenir du contexte à l’époque : en 2000, B.C.J. Moore présentait le TEN-Test, test tonal de passation simple et rapide, supposé alors dépister les ZMC avec une fiabilité de 86% (par rapport aux courbes psychoacoustiques d’accord de fiabilité admise à 100%). Le congrès annuel américain de 2004 avait alors vu se déchaîner les passions avec de nombreuses communications remettant en cause le pourcentage de fiabilité (T. Trinne) ou le décalage de seuil nécessaire au test pour déterminer une ZMC (Van Summers). Finalement, Moore au congrès français avait été mieux acceuilli et moins attaqué !

Dans une publication en 2004, Van Summers en se demandait (malicieusement!) s’il était utile de pratiquer le test de dépistage des ZMC ou bien si l’expérience suffisait. Pour cela un audiogramme test (type pente de ski avec le 4000Hz à 90dB HL) avait été présenté à des audiologistes classés par années d’expérience (de pratique). On leur avait posé deux questions : Combien ? (de gain maximum) et Où ? (allez vous arrêter votre amplification) ; sous-entendu à « vue de nez », présumez-vous une ZMC, et si oui (ou non), quel gain allez-vous appliquer dans la zone concernée. Mais à aucun moment il n’était fait explicitement état d’une possible ZMC.

Il est intéressant de constater que les audiologistes les plus expérimentés ont spontanément limité leur bande passante (frequency cut-off) avant 4000Hz, et n’ont donc pas donné de gain dans la zone alors qu’ils en avaient les moyens. Les audiologistes les plus jeunes ont presque systématiquement fait le contraire, de manière inversement proportionnelle à leur nombre d’années de pratique… (« Yes, we can! »).

On aime les mesures in-vivo, on utilise ces formules de calcul de plus en plus précises, ces bandes passantes à 20000Hz (!), ces anti-larsen « du feu de Dieu » et autres réglages « diaboliques »… mais j’ai adoré cette petite touche de « Je le sens pas trop ce 4000! », bref, un peu de théorie du bordel ambiant dans ce monde cartésien (théorie de Roland Moreno, inventeur de la carte à puce, et qui veut qu’un peu d’incertitude soit nécessaire en toute chose)!

XD

L’article en question (extrait): « Do tests for cochlear dead regions provide important information for fitting hearing aids?« 

Une présentation intéressante sur les zones mortes et la transposition qui rejoint ce billet sur les « fausses routes » phonétiques.