Le but de cette liste d’intégration me semble être de situer, le long des voies auditives, le lieu de la lésion provoquant un trouble d’intégration : « Lorsque l’identification par les voies auditives droite et gauche est significativement différente, il ne s’agit plus d’un trouble fonctionnel mais d’une atteinte lésionnelle… »(1)
Pour ma part, je n’utilise donc pas cette liste d’intégration car elle me paraît être réservée à la détection du siège de problèmes pathologiques sur lesquels l’audioprothésiste n’a aucune prise.
Le Professeur LAFON écrit en page 161 de son livre « le test phonétique et la mesure de l’audition » : « Les atteintes lésionnelles doivent être examinées comparativement à l’audiogramme tonal…Le diagnostic d’une atteinte rétro-cochléaire s’effectue par la discordance entre la perturbation phonétique beaucoup plus marquée que la baisse de l’audition des sons purs ne permet de le prévoir, par l’absence de dominance des distorsions phonétiques de type cochléaire, l’importance de l’aggravation en présence de bruit. »
Puis en page 199 de ce même livre : « Les troubles de l’audition sans surdité relèvent donc des processus d’intégration du message nerveux provoqué au niveau des cellules ciliées de l’organe de Corti jusqu’à sa diffusion au niveau des aires corticales. Nous pouvons rencontrer deux catégories de perturbation : celles qui sont liées à des lésions des circuits d’intégration auditive, celles qui répondent à des troubles fonctionnels. »
Vous trouverez la liste I (= liste 1) des mots composant cette liste d’intégration sur : http://www.college-nat-audio.fr/fichiers/img90a.pdf
Un grand remerciement au Collège National des Audioprothésistes pour avoir réalisé 5 CD d’audiométrie vocale : http://www.college-nat-audio.fr/listes-cd-audiometrie-vocale.html
Tout audioprothésiste devrait les posséder.
Le Professeur avait créé également une liste II (= liste 2), la voici extraite de la page 235 du livre du Professeur LAFON « le test phonétique et la mesure de l’audition » :
On utilise les mêmes niveaux Nm puis Nm + Bm que pour la liste de balayage (voir « LAFON 12 LA LISTE DE BALAYAGE (1) » pour la valeur de ces niveaux respectifs et ce qu’ils signifient).
La liste I est, tout d’abord, émise au niveau Nm en lisant les mots horizontalement. Puis, cette même liste I est émise au niveau Nm mélangé à un niveau Bm de bruit, les mots étant lus verticalement.
La différence du nombre d’erreurs phonétique entre ces deux listes I montre le degré du trouble d’intégration pour une première oreille : « La différence d’erreurs dans les deux mesures permet de connaître de façon précise les qualités de discrimination du sujet testé. Et si l’on définit statistiquement chez le sujet normal l’intervalle de confiance de cette identification on peut reconnaître les niveaux pathologiques. » (2)
Pour tester la seconde oreille, on pratique de même en utilisant la liste II ou en reprenant la même liste I.
Précisions :
Le Professeur LAFON utilise le terme « trouble fonctionnel » dans une des phrases ci-dessus. Il nous en dit plus sur ce qu’il entend par trouble fonctionnel en page 201 de son livre « le test phonétique et la mesure de l’audition » : ce trouble apparait lorsque « …nous n’entretenons pas le conditionnement phonétique auditif…Lorsque par ailleurs il n’est pas utile de garder un bon conditionnement ou que le sujet a peu l’occasion de parler et d’écouter, les qualités de discrimination diminuent entraînant une régression de l’identification phonétique. C’est le cas des isolés, des milieux fermés silencieux (ordres religieux), de certains travaux intellectuels entraînant une distraction auditive. »
Le trouble d’intégration est alors bilatéral et symétrique, « il n’y a pas de dominance significative d’une oreille par rapport à l’autre. »(3)
J’ai interrogé le Professeur LAFON, dans le courant des années 1990, sur la possibilité offerte par les réducteurs de bruit (balbutiants à l’époque) d’améliorer un trouble d’intégration fonctionnel. Il était très sceptique sur l’amélioration possible avec ces systèmes car lorsque le message nerveux n’est pas interprété correctement, quoiqu’on fasse il restera déficient. Donc, dès que je suis face à une difficulté d’intégration, je sais que j’aurai des problèmes à redonner une compréhension correcte dans le calme et a fortiori en ambiance bruyante.
Le Professeur LAFON utilise le terme « discrimination » dans une des phrases ci-dessus. Il nous en dit plus sur ce qu’il entend par discrimination en page 68 du livre « le test phonétique et la mesure de l’audition » :
« Les possibilités de discrimination dont nous disposons sont très importantes. On est étonné de la facilité avec laquelle parmi tous les sons complexes qui nous parviennent nous arrivons à accorder une valeur préférentielle à certains complexes acoustiques : on distingue une voix, donc une parole, parmi un groupe de plusieurs personnes, un message au milieu de bruits complexes aidés probablement par les possibilités de localisation sonore… Dans un concert on peut suivre le jeu d’un instrument que l’on choisit, le reste de l’orchestre devenant un fond sonore, nous pouvons suivre un timbre déterminé de préférence à l’ensemble des timbres instrumentaux… La discrimination repose sur une extraordinaire analyse du message nerveux, mais elle nécessite l’identification des messages acoustiques. »
Le Professeur LAFON, par la figure qui se trouve en page 154 de son livre « le test phonétique et la mesure de l’audition », nous donne, pour les surdités de perception, les limites des distorsions pour une liste de la liste d’intégration émise au niveau Nm :
Un autre intérêt de la liste d’intégration est, pour ceux qui s’occupent d’appareillage d’enfants, de suivre les progrès de l’intégration de l’enfant au fur et à mesure de l’évolution de son âge. La figure suivante, que l’on trouve en page 152 du livre du Professeur LAFON « le test phonétique et la mesure de l’audition », donne les limites de la différence entre les erreurs phonétiques commises au niveau Nm+Bm et celles commises au niveau Nm :
Pour le prochain article, il m’a semblé utile de fournir les listes de balayage, cochléaire, de recrutement, d’intégration en langue anglaise, espagnole et allemande.
Le test phonétique du Professeur LAFON a donc une portée internationale.
JYM
(1) Page 202 du livre du Professeur LAFON « le test phonétique et la mesure de l’audition ».
(2) Page 19 du Bulletin d’Audiophonologie « LE TEST PHONETIQUE THEORIE et PRATIQUE » Volume 2 – Numéro 1 – Année 1972.
(3) Page 199 du livre du Professeur LAFON « le test phonétique et la mesure de l’audition ».